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il fit allumer de grands feux à
l'entrée des cavernes ; 500 personnes, hommes, femmes et
enfants, périrent asphyxiées : " Terrible mais
indispensable résolution ! écrivait Saint-Arnaud. Pélissier
a employé tous les moyens, tous les raisonnements, toutes les
sommations. Il a dû agir avec vigueur. J'aurais été à sa
place, j'aurais fait de même, mais j'aime mieux que ce lot
lui soit tombé qu'à moi. " Ce triste incident, grossi
par des polémiques passionnées, fit grand bruit en France.
Bugeaud couvrit son subordonné, qui n'avait fait qu'exécuter
ses ordres. Soult eut une attitude assez embarrassée; on lui
rappela qu'à la bataille d'Austerlitz, il avait fait briser
par le canon la glace des étangs sur lesquels fuyaient 12 000
hommes. Les cruautés des insurgés envers nos prisonniers et
nos blessés, les atroces mutilations qu'ils faisaient subir
à nos morts ne disposaient pas nos soldats à l'indulgence. |
SIDI-BRAHIM |
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Abd-el-Kader n'avait pas pris
l'initiative de l'insurrection du Dahra, mais, avec son
habileté ordinaire, il chercha à en tirer parti. Il était
d'ailleurs, en 1845 comme en 1839, débordé par la
surexcitation populaire et forcé d'agir avant l'heure qu'il
s'était fixée. Il tenta une incursion dans la vallée de la
Tafna, où plusieurs tribus se soulevèrent à son approche.
Le colonel de Montagnac, officier très instruit et très
brave, mais fougueux, violent et aventureux, commandait le
poste de Djemaâ-Ghazouat (Nemours), très isolé dans les
montagnes des Traras et dont Bugeaud reprochait la création
à La Moricière : " Vous autres messieurs, qui sortez du
génie, vous avez le génie des fortifications, mais vous
n'avez pas le génie de la guerre. J'évacuerai ce poste,
c'est un boulet qui nous est accroché à la jambe. " Les
instructions données à Montagnac lui prescrivaient d'être
prudent et de ne pas s'aventurer hors de la place. Il n'en
tint pas compte et sortit le 21 septembre avec 430 hommes,
talonné sans doute par le désir de prendre Abd-el-Kader. Le
23, laissant une partie de son monde au bivouac près du
marabout de Sidi-Brahim, il se trouva bientôt en présence de
l'émir, qui avait 5 à 6 000 hommes autour de lui. La petite
colonne, affaiblie encore par un fractionnement malheureux,
fut complètement écrasée. Montagnac fut tué un des
premiers. Le capitaine de Géraux, retranché avec une
compagnie à Sidi-Brahim, subit trois attaques furieuses; les
soldats à l'unanimité refusèrent de se rendre et tinrent
bon jusqu'au 26; n'ayant plus ni eau, ni vivres, et n'étant
pas secourus, ils essayèrent de s'ouvrir un chemin vers
Djemaâ-Ghazaouat ; tous périrent, sauf 16 hommes et 96
prisonniers qui tombèrent aux mains de l'émir : " Pour
moi, disait un des survivants en 1892, durant quinze ans, à
peu près toutes les nuits, je revivais quelques-uns des
épisodes de ce terrible combat et aujourd'hui, après
quarante-sept ans, le souvenir m'en reste aussi présent qu'au
premier jour. " |
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