L'arrêté de 1836 et l'ordonnance de 1838 n'avaient modifié que
sur des points de détail l'ordonnance du 22 juillet 1834, qui
demeurait toujours en vigueur. Jusqu'en 1845, tous les pouvoirs
étaient réunis dans la main du gouverneur, qui avait en
particulier le droit d'expulsion. L'intendant civil avait été
maintenu par l'ordonnance de 1834; il avait même vu ses pouvoirs
renforcés en 1836; il fut supprimé en 1838. De 1838 à 1845, trois
chefs de service assistaient le gouverneur général le directeur de
l'intérieur, le directeur des finances et le procureur général.
Soult n'approuvait pas la liberté, trop grande selon lui, que
l'ordonnance de 1838 laissait à l'autorité locale; il entendait la
restreindre et s'efforçait constamment d'intervenir dans les
affaires algériennes ; l'administration civile avait ses
préférences, contrairement aux vues de Bugeaud. D'un compromis
entre les deux tendances sortit l'ordonnance du 15 avril 1845. Plus
développée que les précédentes, elle comprenait 126 articles.
Elle maintenait au Roi le droit de légiférer seul pour l'Algérie,
sur la proposition du ministre de la Guerre. Auprès du gouverneur
général, elle rétablissait un haut fonctionnaire, successeur de
l'intendant civil et intermédiaire entre le gouverneur et les chefs
de service, qui prit le titre de directeur général des affaires
civiles. Le Conseil de gouvernement, composé des chefs de service,
qui, sous des noms divers, existait depuis 1830, prit le nom de
Conseil supérieur d'administration de l'Algérie et fut
réorganisé; la connaissance des conflits administratifs fut
confiée à un Conseil de contentieux, analogue aux Conseils de
préfecture de France. L'ordonnance consacrait la division de
l'Algérie en trois provinces, qui existait en fait depuis la
conquête. Chacune des provinces était subdivisée en territoires
civils, territoires mixtes et territoires arabes, suivant le degré
d'évolution qu'ils avaient atteint. Les territoires civils, dont le
ministre se réservait la haute administration, échappaient
complètement au gouverneur; dans la pensée des rédacteurs de
l'ordonnance, ils devaient finir par absorber l'Algérie tout
entière, mais ils étaient en fait très peu étendus; ils étaient
administrés par des commissaires civils; on y appliquait
l'administration, la justice et le droit français, sauf pour le
statut personnel des indigènes, régi par la loi musulmane. Dans
les territoires mixtes et dans les territoires arabes, les
indigènes et les Européens étaient administrés par les
autorités militaires.
La désignation du duc d'Aumale ramena la question, qui s'était
déjà posée en 1834, de savoir si l'on créerait en Algérie une
vice-royauté. Le gouvernement ne s'engagea pas dans cette voie.
L'ordonnance du 1er septembre 1847 restreignit les pouvoirs du chef
de la colonie plutôt qu'elle ne les augmenta.
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