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  LA CONQUÊTE INTÉGRALE - BUGEAUD ET ABD-EL-KADER (1840-1848)  
     
   mais quant à présent c'est une nécessité, car le nombre des officiers connaissant la langue, les mœurs, les affaires arabes sera longtemps trop restreint pour que nous puissions songer à donner généralement aux Arabes des aghas et des caïds français. Il faut donc nous servir des hommes qui sont en possession de l'influence sur les tribus soit par leur naissance, soit par leur courage, soit par leur aptitude à la guerre ou à l'administration. " Mais Bugeaud ne voyait pas là le dernier mot du régime administratif des tribus; il n'entendait qu'en fixer le point de départ et comptait sur l'expérience pour suggérer les modifications nécessaires. Il ne doit donc pas encourir le reproche d'avoir voulu installer et maintenir dans des positions exceptionnelles les principaux représentants de l'aristocratie arabe; il voulait attendre, pour contrôler sérieusement les chefs indigènes et substituer peu à peu notre autorité à la leur, que le temps et la tranquillité nous en donnassent la possibilité.

Pour aider les commandants supérieurs dans l'administration délicate des affaires indigènes, il leur fallait des auxiliaires familiarisés avec la langue, les habitudes, les idées des populations. L'arrêté ministériel du 1er février 1844, qui est la charte des bureaux arabes, décida qu'il y aurait dans chaque division militaire de l'Algérie, auprès et sous l'autorité immédiate de l'officier général commandant, une direction des affaires arabes. Des bureaux, désignés sous le nom de bureaux arabes, étaient en outre institués dans chaque subdivision auprès et sous les ordres directs de l'officier général commandant; des bureaux arabes devaient être créés également sur chacun des autres points occupés par l'armée partout où le besoin en serait reconnu et dans des conditions semblables de subordination à l'égard des officiers investis du commandement. Le bureau arabe, dans la pensée de Bugeaud, ne devait donc pas être une autorité indépendante, mais un état-major chargé des affaires arabes auprès du commandement supérieur, un intermédiaire entre ce commandement et les chefs indigènes.

Les attributions des officiers chargés des affaires arabes étaient nombreuses et variées. Ils devaient comprendre et parler la langue des indigènes, s'appliquer à acquérir une connaissance approfondie du pays, savoir l'histoire des tribus et dans chaque tribu celle des personnalités marquantes. Ils devaient se déplacer fréquemment, visiter les tribus, les marchés et écouter sur les lieux mêmes toutes les réclamations, afin que l'autorité française apparût aux indigènes comme la protectrice des opprimés contre l'arbitraire des chefs. Ils devaient assurer la transmission des ordres et leur traduction, en expliquer le sens aux chefs indigènes et provoquer leurs avis, veiller à l'assiette et à la rentrée des impôts, au paiement régulier des cavaliers du makhzen, rechercher les biens du beylik, constituer des archives claires et bien ordonnées.

 
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