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  LA CONQUÊTE INTÉGRALE - BUGEAUD ET ABD-EL-KADER (1840-1848)  
     
  
Il apprend chaque jour que des Arabes sont rudoyés et quelquefois battus lorsqu'ils causent le moindre embarras soit sur les routes, soit auprès des fontaines. Cette conduite est indigne d'une nation comme la nôtre. "
Le corps des officiers de bureau arabe a compté en Algérie un grand nombre d'hommes tout à fait remarquables et on peut dire sans exagération que ce sont eux qui nous ont donné l'Afrique du Nord, en nous permettant de faire mouvoir tous les rouages de la société indigène et de l'administrer avec le concours et par l'intermédiaire des grands chefs. Lorsqu'un de nos administrés venait entretenir d'une affaire quelconque le commandant de cercle ou le général, il entendait des politesses banales, plus ou moins exactement traduites par un interprète; puis il était invité à aller s'expliquer avec le chef de bureau arabe, qui seul était en mesure de connaître la situation et de résoudre les difficultés.
L'institution, comme on le verra, a dégénéré par la suite. Le mouvement imprimé par Bugeaud aux affaires indigènes s'est continué jusque vers 1851, ou même jusqu'en 1858. Puis, peu à peu, le personnel des bureaux arabes a fini par recevoir des sujets d'un mérite moindre. Les pouvoirs considérables dont ils étaient investis, le maniement de fonds sans contrôle, le contact des chefs indigènes prévaricateurs a parfois corrompu certains hommes de moralité médiocre. En même temps, les bureaux arabes, contrairement aux intentions formelles de Bugeaud, se rendaient indépendants du commandement. Enfin, au fur et à mesure que notre contrôle sur les indigènes se resserrait, ils étaient amenés à descendre dans le détail de l'administration, auquel des officiers sont en général peu préparés. Les indigènes, très bons observateurs de tout ce qui les intéresse directement, ont très bien aperçu cette transformation; ils distinguent les bureaux arabes makhzenia ou de gouvernement, ceux de la première période, des bureaux arabes hekkam ou d'administration qui leur sont succédé.

IV

LA COLONISATION

 

Dans la proclamation qu'il adressa aux habitants à son arrivée à Alger, Bugeaud disait : " La conquête serait stérile sans la colonisation. Je serai donc colonisateur ardent, car j'attache moins de gloire à vaincre dans les combats qu'à fonder quelque chose d'utilement durable pour la France. " Il tint parole. Plusieurs gouverneurs avant lui, notamment Clauzel, s'étaient préoccupés de la colonisation, mais Bugeaud réussit là où ils avaient échoué, grâce à son énergie et à sa ténacité, et parce que l'incertitude qui pesait sur l'avenir de l'Algérie avait pris fin avec la conquête intégrale.

 
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