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  LA CONQUÊTE INTÉGRALE - BUGEAUD ET ABD-EL-KADER (1840-1848)  
     
  
Bugeaud ne croyait pas à la grande colonisation : " L'État, disait-il, s'expose à donner des espaces considérables qui ne recevront qu'une population rare de mercenaires ou qui n'en recevront aucune. " C'est ce qui faisait dire très justement à Pellissier de Reynaud : " Le gouverneur général, par son éloignement des grandes concessions, par sa prédilection pour la petite propriété, par sa sage incrédulité touchant la puissance féerique des capitaux dans un pays où il s'agit avant tout d'organiser le travail, est, en Algérie, le vrai représentant des intérêts démocratiques, dont la plupart de ses antagonistes de la presse se disent les apôtres. "
 

ESSAIS DIVERS. LA GRANDE COLONISATION

 
Les lieutenants de Bugeaud, La Moricière et Bedeau, ne partageaient pas toutes ses idées en matière de colonisation. La Moricière avait dressé un vaste plan de colonisation de la province d'Oran ; il s'agissait de libérer, entre Oran, Mascara et Mostaganem, 80 000 hectares sur lesquels on devait installer 5 000 familles; l'État ne prenait à sa charge que les travaux d'utilité commune : enceinte du village, nivellement, adduction d'eau, chemins ; le reste devait être exécuté par des capitalistes à qui on concédait le village à charge d'y installer des familles en nombre fixe. En 1846, on mit en adjudication la concession à l'entreprise de six villages des environs d'Oran ; un seul, Sainte-Barbe-du-Tlélat, trouva preneur et l'adjudicataire ne tarda pas à avouer son impuissance. Même insuccès l'année suivante avec d'autres villages. A Saint-Denis-du-Sig, en 1846, on concéda 3 000 hectares, près du barrage qu'on venait de construire, à l'Union agricole que recommandait La Moricière et qui s'engageait à installer 300 familles européennes. On trouvait dans cette société une combinaison des doctrines Saint-Simoniennes et des doctrines Fouriéristes; c'était à la fois un phalanstère et une commune associée; on espérait échapper ainsi à la fois aux inconvénients des grandes concessions individuelles et de la petite colonisation; 2 000 actions de 500 francs, divisibles en coupures de 50 francs, furent émises à Lyon et à Oran. Le capitaine d'artillerie Gautier, qui n'était ni administrateur ni agronome, en prit la direction. Les colons ne venant pas, on embaucha des salariés. Le travail en commun fut, comme pour les colonies militaires, la cause principale de l'échec; l'entreprise fut abandonnée en 1853. De ces diverses tentatives de collectivisme agraire, il n'est rien resté en Algérie, mais l'étatisme s'y est conservé sous la forme de la colonisation officielle. En 1841, M. de Corcelles, visitant l'Algérie, suggéra à Bugeaud d'y appeler les Trappistes. Le gouverneur se montra d'abord peu enthousiaste, puis se rallia à ce projet qui avait l'appui de la reine Marie-Amélie :
 
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