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  L'ALGÉRIE SOUS LE SECOND EMPIRE (1851-1870)  
     
   Jamais l'État ne s'était montré aussi généreux ou plutôt aussi prodigue; les colons payaient immédiatement les deux cinquièmes du prix des maisons, la Compagnie avait une hypothèque pour le reste, dont elle touchait l'intérêt à 5 pour 100 ; elle faisait simplement un simple placement hypothécaire. Contrairement à l'ordonnance du 5 juin 1847, la Compagnie était dispensée de toute redevance envers l'État. Le maréchal Randon protesta, mais en vain; le comte Sautter de Beauregard jouissait évidemment d'un grand crédit à la cour impériale et on passa outre aux objections de l'administration.

Un premier village, Aïn-Arnat, à 8 kilomètres de Sétif, fut fondé dès 1854; la Compagnie y établit 50 familles, formant un effectif de 400 personnes, originaires des cantons de Vaud, de Genève et d'Argovie. M. Sautter de Beauregard, reprenant ses vastes projets du début, proposait d'amener tous les ans 15 à 18 000 familles suisses ou allemandes et demandait un million d'hectares pour y établir 500 villages de 50 feux. L'examen de ces projets mirifiques fut sagement ajourné. Bientôt les difficultés commencèrent; l'émigration vers Sétif s'arrêta; la Compagnie s'efforça de la ranimer en installant des agences de recrutement à Berne et à Turin; elle parvint à se procurer 3 000 émigrants, Suisses, Allemands, Italiens sans ressources et qui n'étaient pas de véritables colons. Quatre nouveaux villages, Bouhira, Messaoud, Mahouan et El-Ouricia, furent construits, mais non peuplés; ils comptaient 222 colons et 421 ouvriers assimilés aux colons qui ne représentaient pas une population stable. Comme d'ailleurs aucune obligation de résidence n'était imposée, la Compagnie se contenta bientôt d'un simple simulacre, afin de toucher la prime et de prélever les 800 hectares de terres qui lui étaient attribués pour chaque village; elle s'arrangea d'ailleurs pour mettre dans son lot les meilleurs domaines. Bientôt elle renonça complètement à amener des colons et se contenta de louer ses terres aux indigènes. Le peuplement était coûteux, les exploitations privées de la Compagnie rémunératrices ; elle parvint à se faire exonérer, par une décision impériale du 24 avril 1858, des obligations de peuplement qui lui étaient imposées et reçut en toute propriété 12 340 hectares. Dès lors, dégagée de toute entrave, elle n'eut plus qu'un souci, réaliser par tous les moyens possibles le maximum de bénéfices; elle y réussit fort bien. Mais au point de vue du peuplement, les résultats étaient nuls. Les 2 956 émigrants que la Compagnie avait amenés diminuèrent de plus en plus; les villages tombèrent en ruine; il n'y a plus aujourd'hui sur cet immense domaine qu'une centaine d'Européens.

D'autres tentatives du même genre échouèrent pareillement. Le territoire de Tipaza (26 000 hectares) fut concédé, par un décret du 12 août 1854, à un entrepreneur parisien, M. Demonchy, à charge d'établir un village de 50 familles ;

 
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