Page précédente HISTOIRE DES COLONIES FRANÇAISES - Tome2 - Retour page Table des matières ALGÉRIE - LIVRE III  - CHAP. 2 Page suivante
  L'ALGÉRIE SOUS LE SECOND EMPIRE (1851-1870)  
     
   On pensait qu'un si haut personnage obtiendrait beaucoup pour le pays, briserait les mauvaises volontés et les résistances, mettrait fin à l'arbitraire qu'on reprochait au régime militaire. Le prince avait de bonnes intentions et prit en effet quelques mesures heureuses. Mais ni lui ni ses conseillers ne connaissaient l'Algérie. Ce fut bientôt un entassement de circulaires, un déluge de projets qui aboutirent à un gâchis administratif complet. Surtout, le ministre se heurta à la mauvaise volonté des chefs militaires ; ceux-ci firent en particulier des observations sur la suppression de la responsabilité collective des tribus et sur l'institution des commissions disciplinaires, qui restreignaient le pouvoir des officiers des bureaux arabes; des circulaires et des décisions réitérées ne parvinrent pas plus à vaincre leur résistance qu'à aplanir les difficultés pratiques. Martimprey, commandant de la province d'Oran, ayant écrit au ministre à ce sujet, reçut pour toute réponse une circulaire où le prince incriminait la répugnance des militaires à marcher dans la voie des réformes. Les officiers des affaires indigènes, en butte à des attaques journalières, se décourageaient; on créa des bureaux arabes civils, avec un personnel inexpérimenté, qui ne sut que copier les défauts du régime auquel il succédait sans avoir ses qualités.

Au bout de peu de temps, tous les services étaient désorganisés, le mécontentement général. Le prince était trop intelligent pour ne pas s'apercevoir promptement qu'il était impossible d'administrer l'Algérie de loin. Assez versatile d'ail leurs et peu capable d'un effort soutenu, il était plus préoccupé, à cette époque, de son mariage et des affaires de l'Italie que des questions algériennes. Il donna sa démission en 1859.

L'essai avait été trop court pour qu'on pût porter un jugement définitif sur l'institution du ministère de l'Algérie; on le maintint et on donna comme successeur au prince Napoléon le comte de Chasseloup-Laubat. C'était un excellent choix. Ancien député à l'Assemblée nationale, ancien ministre de la Marine et des Colonies, président du Conseil d'administration de la Compagnie des chemins de fer de l'Ouest, il avait fréquemment défendu l'Algérie au Conseil d'État et dans les assemblées parlementaires; son expérience des affaires lui donnait une situation importante au Corps législatif. Il comprit que la première chose à faire pour bien administrer l'Algérie, c'était de la connaître; il l'avait visitée autrefois comme député; à peine ministre, il y revint; si le prince Napoléon en avait fait autant, il aurait sûrement évité bien des erreurs.

La politique de Chasseloup-Laubat s'opposa sur bien des points à celle du prince Napoléon. Cependant il ne pouvait ni ne voulait bouleverser de fond en comble une oeuvre qu'il s'agissait de juger à ses résultats.

 
  334  
Page précédente Retour page Table des matières Page suivante