Après avoir
établi une redoute à Berkane, on pénétra au cœur du
massif des Beni-Snassen ; le combat d'Aïn-Taforalt, que
nous livrèrent le 27 octobre les montagnards, nous rendit
maîtres de la région et dès le 29, les Beni-Snassen
faisaient leur soumission. Le général de Martimprey revint
par la plaine des Angad et Oudjda, pendant que le commandant
de Colomb pourchassait les Beni-Guil dans la direction de
Figuig.
L'épidémie de choléra mit fin brusquement à la
campagne et ne permit pas à nos troupes de poursuivre leurs
avantages. Cependant les circonstances eussent été
singulièrement favorables pour occuper les régions que nos
troupes victorieuses avaient parcourues. Le sultan
Abd-er-Rahman venait de mourir et avait été remplacé par
Sidi-Mohammed, qui était aux prises avec des difficultés
intérieures; un prétendant sollicitait notre appui. On se
demanda s'il ne convenait pas de porter notre frontière sur
la Moulouya.
L' Empereur envisagea même un instant un partage des
pays musulmans de la Méditerranée entre les puissances
européennes, dans lequel le Maroc aurait été attribué à
la France, l'Égypte à l'Angleterre, la Tunisie et la
Tripolitaine à l'Italie. La vallée du Nil n'avait pas
alors la valeur internationale que devait lui donner le
percement de l'isthme de Suez. « La possession de
l'Égypte, dit lord Palmerston, ne serait pas, au point de
vue politique, militaire et naval, considérée chez nous
comme la contre-partie de la possession du Maroc par la
France. » D'autres soucis absorbèrent d'ailleurs bientôt
Napoléon III, qui ne s'intéressait aux colonies que de
façon très intermittente. |