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  L'ALGÉRIE SOUS LE SECOND EMPIRE (1851-1870)  
     
   Mais, très jaloux de ses prérogatives, quoique ne les exerçant pas, il n'en déléguait aucune et ses subordonnés, pour échapper aux éclats de ses terribles colères, se gardaient bien d'imprimer aux choses de la colonie une impulsion qu'il était incapable de leur donner. "
Pélissier avait d'excellentes intentions et des idées très sages, les idées d'un élève de Bugeaud. Dans une circulaire du 16 avril 1861, il faisait appel à la concorde des autorités civiles et militaires : " Le gouvernement de l'Algérie, disait-il, a une mission essentiellement civile, il ne déviera pas de ce but entre mes mains. " Quoique la récolte de 1861 eût été fort mauvaise, le commerce, l'industrie, l'agriculture prirent un certain essor. L'Algérie figura avec honneur à l'Exposition universelle de Londres en 1862; on déclara que sa section était la plus intéressante avec celle de l'Australie par le nombre, la variété, la beauté des produits. Pélissier demanda et obtint un crédit de 2 500 000 francs pour achever la construction de la voie ferrée d'Alger à Blida, qui fut ouverte au trafic en 1862. La Compagnie qui s'était constituée en 1860 en vue de la construction et de l'exploitation du réseau algérien s'étant montrée impuissante à remplir ses engagements, ce réseau fut rétrocédé à la Compagnie Paris-Lyon-Méditerranée par la loi du 7 avril 1863; la concession devait avoir une durée de 99 ans, la Compagnie recevait une subvention de 80 millions et une garantie d'intérêt pour 80 autres millions.

Pélissier était nettement partisan de la colonisation; ses vues en cette matière étaient celles de Bugeaud. Dans un banquet au gouvernement général, un des convives ayant porté un toast au vainqueur de Sébastopol, le maréchal répondit : " Il est une oeuvre aussi méritoire et non moins difficile peut-être que de prendre Sébastopol : c'est de développer par la colonisation les éléments de prospérité de l'Algérie. Cette oeuvre, j'aspire à l'accomplir et si j'y réussis comme je l'espère, j'aurai réalisé le plus cher de mes vœux. " Un jour, on le vit donner un exemple singulier et qui touchait presque au scandale; des pétitions circulaient contre les projets de royaume arabe qu'on prêtait à l'Empereur: le gouverneur général sortit de son palais à pied, en grand uniforme, et alla rue Bab-Azzoun signer la pétition, pour montrer par un éclat public quelles étaient ses préférences.

La question foncière se posait à nouveau si l'on voulait poursuivre et développer la colonisation européenne. Le cantonnement paraissait fournir la solution cherchée; tout en laissant aux indigènes une quantité de terres plus que suffisante, en fixant sur les terres leurs droits jusque-là mal définis et qui les mettaient à la discrétion des chefs, en constituant sur ce qui leur était laissé la propriété familiale, on en aurait prélevé une part, qui eût pu être concédée ou vendue aux Européens; jusque-là, le cantonnement était pratiqué en vertu de simples instructions administratives et l'absence de toute disposition légale n'était pas sans occasionner de multiples difficultés.

 
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