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  L'ALGÉRIE SOUS LE SECOND EMPIRE (1851-1870)  
     
   Le 13 avril, le Sénat entendit un discours de Michel Chevalier. Il rappela l'existence d'un marché des terres aux États-Unis : " J'aurais voulu trouver, dit-il, dans le sénatus-consulte, le germe de quelque chose de ce genre. Mais il n'offre rien de semblable. J'y trouve une concession considérable faite aux Arabes et qui est plus qu'ils n'auraient osé espérer. J'y cherche en vain, il faut bien le dire, la preuve d'une grande sollicitude, je ne dirai pas pour les colons actuels, mais pour les colons à venir. Ce qu'il faut pour faire de l'Algérie une terre française, c'est une forte population européenne. Or, a-t-on fait dans le sénatus-consulte quelques réserves pour encourager cette population à venir s'établir en Afrique sous le drapeau français? Nullement. Rien n'a été prévu dans ce but, rien n'a été préparé. Vous avez, à ce qu'on dit, 900 000 hectares à offrir à ces colons si désirables. Ces 900 000 hectares sont-ils bien réellement prêts à être vendus? Je ne le pense pas. Il n'existe pas un bureau où les colons venus des départements français, ou de Suisse, ou d'Allemagne, ou de tout autre autre pays d'Europe, puissent choisir et acquérir les terres à leur convenance, en disant : voici mon argent, je prends tel lot. Vous n'avez rien de pareil et c'est là ce qu'il faudrait que vous eussiez. Neuf millions d'hectares sont abandonnés aux Arabes par le sénatus-consulte; sur ces neuf millions, il y en a deux sur lesquels il ne peut y avoir la moindre contestation, ce sont les terres actuellement cultivées par eux; il aurait été possible, facile même de faire entrer tout de suite dans la propriété individuelle ces deux millions d'hectares. Quant aux sept autres millions qu'on leur abandonne, je répète qu'on a été bien généreux, qu'on aurait pu en réserver une partie. " Après les discours de M. Baroche, ministre, président du Conseil d'État, et du général Charon, le projet de sénatus-consulte fut voté à une grande majorité; il y eut seulement deux voix contre et quelques abstentions.

Le sénatus-consulte du 22 avril 1863 déclarait les tribus de l'Algérie propriétaires des territoires dont elles avaient la jouissance permanente et traditionnelle à quelque titre que ce fût. Il devait être procédé administrativement et dans le plus bref délai : 1° à la délimitation du territoire des tribus; 2° à leur répartition entre les différents douars de chaque tribu; 3° à l'établissement de la propriété individuelle entre les membres de ces douars, partout où cette mesure serait jugée possible et opportune. Un règlement d'administration publique détermina les formes à suivre pour procéder à ces opérations et des instructions générales précisèrent les vues de l'Empereur.

Le sénatus-consulte n'était pas seulement une loi sur la propriété : c'était un grand bouleversement politique et social, aboutissant à la dissolution de la tribu.

 
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