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  L'ALGÉRIE SOUS LE SECOND EMPIRE (1851-1870)  
     
  
Il mit au service de son pays son influence, qui était grande, sur les populations catholiques de l'Europe méridionale établies dans l'Afrique du Nord, Maltais, Italiens, Espagnols. On dira ailleurs le rôle de premier plan qu'il a joué dans la prise de possession de la Tunisie. Il fut un grand missionnaire et un grand Africain : « J'ai tout aimé de notre Afrique, disait-il : son passé, son avenir, ses montagnes, son ciel, les grandes lignes de ses déserts, les flots d'azur qui la baignent. »
Mgr LAVIGERIE Le gouvernement avait essayé de faire le silence sur la famine et le typhus qui sévissaient en Algérie. M. Rouher déclarait que la situation n'était pas aussi mauvaise qu'on l'avait dit. L'archevêque n'hésita pas ; par la voie des journaux, il fit connaître la misère épouvantable du pays. Il montra les indigènes mourant en foule sur les routes, se nourrissant de racines, dévorant même des cadavres. Il entreprit une vaste tournée de prédication pour réunir les secours qui devaient arracher ces malheureux à une mort effroyable. Il recueillit 1 800 enfants abandonnés dans ses orphelinats de Ben-Aknoun et de Kouba ; 500 moururent; il en resta environ un millier, pour lesquels il acheta des terres dans la vallée du Chélif ; c'est l'origine des villages arabes chrétiens de Saint-Cyprien et de Sainte-Monique. La tentative demeura d'ailleurs isolée et sans action sur l'ensemble de la société indigène.

Un conflit s'éleva bientôt entre le gouverneur général et l'archevêque au sujet de ces orphelins. Le maréchal, sous l'inspiration des bureaux arabes, voulait que les petits indigènes, une fois la famine terminée, fussent renvoyés dans les tribus.

L'archevêque s'y refusa et protesta avec énergie : « Je suis, dit-il, le père, le protecteur de tous ceux de ces enfants dont les pères, dont les mères, dont les tuteurs n'existent plus. Ils m'appartiennent, parce que la vie qui les anime encore, c'est moi qui la leur ai conservée. C'est donc la force seule qui les arrachera de leurs asiles et si elle les en arrache, je trouverai dans mon cœur d'évêque de tels cris qu'ils soulèveront contre les auteurs de ces attentats l'indignation de tous ceux qui méritent encore sur la terre le nom d'hommes et celui de chrétiens. »
 
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