|
La Commission séjourna en Algérie du 29 avril au 17 juillet,
parcourant les trois provinces, s'arrêtant dans les différents
centres; 151 questions furent posées, concernant les conditions
générales et spéciales de la production agricole, les débouchés
et la législation économique, enfin la législation civile et
générale. Tous ceux qui pouvaient fournir des renseignements
furent consultés et écoutés. Les déposants réclamèrent tous de
l'eau, des terres, du crédit; ils demandaient des travaux
d'irrigation, se plaignaient de l'insuffisance des territoires de
colonisation et de la trop faible étendue des lots, réclamaient
l'organisation du crédit agricole. Presque tous les Européens
demandaient le remplacement de la propriété collective par la
propriété individuelle chez les indigènes. Les musulmans se
plaignaient de la vénalité et des prévarications des cadis et
déclaraient en général préférer la justice française.
Branthomme, propriétaire à Blida, remit au président le programme
des habitants de la Mitidja ; ils exigeaient avant tout le
développement de la colonisation et du peuplement européen, et
cela dans l'intérêt même des indigènes, comme le seul moyen de
modifier leur déplorable état social et d'accroître leur
bien-être; pour y parvenir, ils préconisaient la création de
villages par l'administration, l'extension du territoire civil, la
suppression des bureaux arabes en territoire civil, le partage des
terres collectives et la constitution de la propriété privée, le
rattachement de l'Algérie au ministère d'État. Un propriétaire
de Chebli demandait, pour attirer les émigrants, des terres, des
travaux d'utilité publique, des institutions de crédit, une
administration large et point tracassière, le rapprochement de la
législation avec celle de la France.
« Il faut, disait-il, que les immigrants trouvent mieux dans leur
nouveau pays que dans l'ancien et non pas plus mal. » Le maire de
l'Arba, sans méconnaître les bienfaits des réformes politiques,
administratives et judiciaires, voulait surtout des barrages, des
routes, des chemins vicinaux, du crédit agricole, de nouveaux
centres européens. M. Courserant, propriétaire à Mostaganem,
expliquait que le sort du peuple arabe était étroitement lié au
sort de la colonisation; qu'il fallait autant que possible le mettre
en contact avec nos colons, nos propriétaires, nos commerçants et
constituer chez lui la propriété individuelle.
La presque unanimité des Algériens émit des vœux en faveur de
l'assimilation. M. Loizillon, de Miliana, demandait l'application du
Code Napoléon aux indigènes. « C'est un contresens, disait un
propriétaire de Cherchel, ancien intendant militaire, de donner
l'administration de l'Algérie au ministère de la Guerre et à
l'armée. Quant aux Arabes, faites-les Français, traitez-les comme
tels et non en nation arabe, qui à ce titre resterait toujours
ennemie de la nôtre. » A Médéa, M. Daudet insiste pour qu'on
décrète d'urgence territoire civil tout le territoire de
l'Algérie et son assimilation complète à la métropole.
|
|