|
Le 18 janvier 1871,
le ministère de la Guerre avait donné l'ordre au général
Lallemand d'organiser sans délai un régiment de spahis et
de l'embarquer pour la France.
Les spahis de Bou-Hadjar, du Tarf et d'Aïn-Guettar
refusèrent formellement d'obéir à cet ordre. Ceux d'Aïn-Guettar
désertèrent, pillèrent et assassinèrent dans les
environs de Souk-Ahras, puis attaquèrent la ville, qui fut
délivrée par une colonne venue de Bône. Ce foyer éteint,
un autre se ralluma à El-Milia ; sans mot d'ordre, sans
cause connue, les Kabyles vinrent assiéger le bordj. Un
troisième foyer parut à Tébessa ; les Ouled-Khalifa
enlevèrent les troupeaux d'un colon, tirèrent des coups de
feu sur le commandant supérieur, pillèrent les, environs
de Tébessa et cernèrent la ville. |
|
MOKRANI |
Le mouvement allait devenir
beaucoup plus sérieux avec la révolte de Mokrani.
L'insurrection avait désormais un chef, se personnifiait
dans un homme. Les indigènes aujourd'hui encore appellent
l'année 1871 l'année de Mokrani, âm Mokrani.
Bien qu'une tradition sans aucun fondement les rattache aux
Montmorency et qu'une autre tradition, qui n'a sans doute
pas beaucoup plus de valeur, les fasse descendre de Fathma,
fille du Prophète, les Ouled-Mokrani étaient en réalité
une famille kabyle installée au quinzième siècle à la
Kalaâ des Beni-Abbès ; ils s'étaient constitué une sorte
de principauté qui s'étendait de l'Oued-Sahel au Hodna. Au
dix-huitième siècle, ils étaient partagés en deux sofs,
entre lesquels les Turcs entretenaient soigneusement les
divisions. En 1838, Ahmed-el-Mokrani nous avait fait des
offres de service; il était devenu un des grands
feudataires indigènes créés par Valée dans la province
de Constantine et c'est grâce à son concours que
l'expédition des Portes-de-Fer avait pu s'effectuer sans
encombre en 1839. Il avait vu sa situation diminuée par
l'ordonnance du 15 avril 1845 et ce grand vassal était
devenu un grand fonctionnaire, officiellement placé sous
les ordres du commandant supérieur; il en avait conçu
quelque mauvaise humeur. A sa mort, le khalifalik fut
supprimé et son fils Mohammed-Mokrani fut nommé bachagha ;
peu à peu, on réduisit ses pouvoirs, ses cavaliers, sa
part d'impôt, on supprima les touiza ou redevances
féodales. Napoléon III avait comblé d'honneurs et de
décorations les chefs indigènes. |
|
|
|