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  L'ALGÉRIE DE 1870 à 1890  
     
  
Cependant, par la force des choses, la noblesse féodale s'était peu à peu transformée en une sorte de noblesse de cour et avait perdu avec sa fortune la plupart de ses privilèges. A la suite de l'ordre du jour du 9 mars 1871 condamnant le régime militaire, la démission de Mac-Mahon avait été suivie de celle de Mokrani, qui ne fut pas acceptée.

Survint la guerre franco-allemande. Mokrani, à l'époque de la famine de 1868, avait emprunté 350 000 francs pour venir en aide aux indigènes de la région; le gouverneur général lui avait garanti que ces avances lui seraient remboursées, mais cette promesse n'avait pas été tenue. En 1870, la Banque de l'Algérie et la Société Algérienne ayant resserré leur crédit, Mokrani dut consentir une hypothèque générale sur ses biens. Cependant sa situation financière n'était pas obérée d'une manière assez inquiétante pour le pousser à la révolte. Mais le gouvernement civil était l'effroi du bachagha ; ce qu'il voyait, ce qu'il entendait, ce qu'il lisait dans les journaux n'était pas de nature à modifier ses sentiments. Le décret du 24 octobre naturalisant les Israélites ajouta à son amertume : « Je consens, disait-il, à obéir à un soldat, je n'obéirai jamais à un Juif ni à un marchand. » La situation se tendait de plus en plus. On s'efforça de calmer Mokrani sans y parvenir : « Les Français, disait-il, sont bien ingrats et injustes envers ma famille; ils veulent me jeter dans l'insurrection. » Il renouvela sa démission. Le 14 mars, à la Medjana, un conseil de famille fut tenu dans lequel on décida une manifestation armée pour obliger le gouvernement français à compter avec les grands chefs. Le bachagha ne voulait ni massacres ni pillages; il se proposait de bloquer et d'isoler les villes, d'où les Français ne pourraient plus sortir, afin de les contraindre à acheter par des concessions l'alliance des grandes familles : « Je me bats, disait Mokrani, contre les civils, non contre la France ni pour la guerre sainte. »
Le 16 mars 1871, 6 000 indigènes vinrent assiéger Bordj-bou-Arreridj, qui fut pillée et incendiée; la petite garnison retirée dans le fort fut délivrée par une colonne de secours. En même temps, Ahmed-Bou-Mezrag, frère du bachagha, attaquait les caravansérails de l'Ouennougha.

 

LA GUERRE SAINTE

 
Cependant Mokrani restait isolé avec quelques-uns de ses parents et ne réussissait à rallier à sa cause aucun des membres marquants de cette aristocratie indigène dont il s'était constitué le champion.
 
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