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  L'ALGÉRIE DE 1870 à 1890  
     
   Le titre Ier du décret réglait les conditions auxquelles les Alsaciens justifiant d'un capital d'au moins 5 000 francs pourraient obtenir des concessions avec propriété immédiate. Le titre II permettait d'accorder des concessions à tous les Français, Alsaciens ou non, ayant ou n'ayant pas de ressources, moyennant un loyer d'un franc par an et par hectare; la pleine propriété n'appartiendrait au concessionnaire qu'après une résidence effective de neuf ans et la mise en culture de la concession. Pour la première fois, les étrangers étaient exclus des concessions de terres : « Nous avons à fonder, disait le rapporteur, une colonie française, non européenne. »
Des commissions furent constituées à Belfort et à Nancy pour recevoir les engagements; elles furent assiégées de demandes, mais ces demandes sollicitaient pas d'agriculteurs aisés des pays annexés; presque tous les Alsaciens qui demandaient des concessions étaient des ouvriers de fabrique atteints par le chômage : « Les cultivateurs, disait M. d'Haussonville, se trouvaient être de beaucoup les moins nombreux. » La plupart des demandeurs ne disposaient d'aucun capital; en mars 1874, sur 877 familles installées dans les centres, 38 seulement remplissaient les conditions prévues au titre Ier, 839 bénéficiaient du titre II, c'est-à-dire étaient sans ressources.

Malgré la bonne volonté et les efforts de tous, malgré l'active collaboration de l'autorité militaire, en particulier du général de Galliffet, il y eut beaucoup de défectuosités et de mécomptes. La différence est grande entre le climat des pays annexés et celui de l'Algérie; les nouveaux venus étaient très inexpérimentés; lorsqu'ils arrivèrent, les installations destinées à les recevoir n'étaient pas achevées; ils durent loger sous la tente ou dans des gourbis ; l'état sanitaire s'en ressentit et les maladies sévirent sur les colons. Des initiatives privées s'efforcèrent de leur venir en aide; on leur attribua le fonds Wolowski, s'élevant à 6 millions et provenant d'une souscription pour la libération du territoire. La Société de protection des Alsaciens-Lorrains, présidée par le comte d'Haussonville, exerça une action généreuse et efficace, ainsi que M. Jean Dollfus.
Les Alsaciens furent établis surtout à l'extrémité orientale de la Mitidja, dans les vallées kabyles, dans la vallée de la Soummam, sur les plateaux de Sétif et de Constantine. Des villages furent nommés Strasbourg, Metz (Akbou), Rouffach, la Robertsau. Le premier village fondé fut Belle-Fontaine, à l'entrée de la Kabylie; puis vinrent Bou-Khalfa, création de Jean Dollfus ; Azib-Zamoun (Haussonvillers), création de la Société de protection des Alsaciens-Lorrains. Dès 1e mois de décembre 1873, 33 familles sont installées à Haussonvillers « soit 135 personnes, plus une 136ème qui vient de naître. » On en était réduit au strict indispensable, bien qu'une famille eût amené un piano.

 
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