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M LAFERRIÈRE
(1898-1900) |
LA CRÉATION DES DÉLÉGATIONS
FINANCIÈRES ET LA RÉORGANISATION DU CONSEIL SUPÉRIEUR |
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M. Laferrière, vice-président
du Conseil d'État, remplaça M. Lépine en juillet 1898.
Jurisconsulte éminent, homme grave et pondéré, il ne se
contenta pas de réprimer l'émeute; il voulut en prévenir
le retour en faisant les réformes nécessaires. Il
rétablit l'ordre dans la rue, dans l'administration, dans
les attributions et le fonctionnement des corps
administratifs. Le maire antisémite d'Alger, Max Régis,
fut suspendu; un « préfet à poigne », M. Lutaud, fut
nommé. Mais M. Laferrière eut le grand mérite de
comprendre que des mesures de répression ne suffisaient pas
et que, pour atteindre le mal dans ses racines, pour
détourner les Algériens des agitations stériles de la
rue, il fallait donner un élément à leur activité. Il
obtint du gouvernement les décrets du 23 août 1898, qui
sont une sorte de constitution de l'Algérie.
Le premier de ces décrets, relatif aux attributions du
gouverneur général, reproduisait le décret de 1896 et
modifiait quelques-unes de ses dispositions pour fortifier
et préciser les pouvoirs du gouverneur général. Un second
décret créait, sous le nom de Délégations financières
algériennes, une assemblée élective nouvelle, qui a pour
but d'apporter au gouvernement général de l'Algérie le
concours d'opinions libres, d'avis éclairés et de vœux
réfléchis, émis par des représentants directs des
contribuables algériens sur toutes les questions d'impôts
et de taxes assimilées. Cette assemblée se compose de
trois délégations; celle des colons (24 membres)
représente les intérêts de la colonisation et de
l'agriculture; celle des non-colons (24 membres) représente
les intérêts des commerçants, des industriels, des
ouvriers; celle des indigènes (21 membres, dont 6 forment
la section kabyle) représente les intérêts de la
population indigène. Les Délégations délibèrent d'abord
séparément, puis se réunissent en séance plénière pour
le vote du budget. Corrélativement, le corps électoral, au
lieu de former une masse unique, est divisé en plusieurs
groupes nommant chacun une délégation. Il faut, pour être
électeur aux Délégations financières, avoir vingt-cinq
ans d'âge, être Français depuis douze ans au moins et
résider en Algérie depuis trois ans au moins. Quant à la
délégation indigène, le décret de 1898 la faisait élire
par les indigènes figurant dans les conseils municipaux des
communes de plein exercice ou dans les commissions
municipales des communes mixtes. Un troisième décret
réorganisait le Conseil supérieur en y introduisant
jusqu'à concurrence de plus de moitié (31 membres sur 60)
des éléments électifs issus des Délégations
financières et des Conseils généraux. Ces deux
assemblées devaient être purement consultatives jusqu'à
l'institution du budget spécial de l'Algérie. |
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