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  L'ALGÉRIE de 1890 à 1914. La renaissance coloniale.  
     
   Les Délégations financières reposent sur le principe de la représentation des intérêts. Elles constituent un mécanisme fort ingénieux, tel qu'on pouvait l'attendre de la science juridique de M. Laferrière et on ne peut leur reprocher qu'une excessive complication : complication voulue d'ailleurs et destinée à empêcher les écarts auxquels peut se livrer une assemblée unique et homogène. L'âge de l'électorat fixé à vingt-cinq ans, la naturalisation depuis douze ans étaient des précautions prises pour empêcher l'afflux trop rapide des Néo-Français.
Les assemblées algériennes ressemblent à première vue aux deux Chambres d'un Parlement. Mais elles n'ont en réalité ni pouvoir législatif, ni autorité souveraine. Elles ont un rôle prépondérant dans l'élaboration du budget, qu'elles votent sous réserve d'homologation par décret rendu en Conseil d'État et d'approbation par le Parlement. Toute modification au régime fiscal de l'Algérie doit être voté par elles. Ce sont elles également qui votent les emprunts et autorisent le gouverneur à accorder des concessions de chemins de fer. Mais en dehors du budget, dont l'examen leur incombe, elles ne peuvent qu'émettre des vœux et donner des avis; dans la pensée de leur créateur, elles rappelleraient donc plutôt les Conseils généraux des colonies.

La première session des Délégations financières s'ouvrit à Alger en décembre 1898 : « Je confie à votre sagesse et à votre patriotisme, disait M. Laferrière, cette institution nouvelle. Je vous la remets comme on remet au colon une terre pleine de sève, mais qui a besoin, pour devenir féconde, du travail et de la calme persévérance de celui qui la détient. » A l'ouverture de la deuxième session, en novembre 1899, M. Laferrière indiquait très bien dans quel esprit les Délégations financières avaient été conçues : « L'avenir, disait-il, ne dépend pas de l'action que la population algérienne s'efforcerait d'exercer sur les destinées de la métropole en fournissant un modique appoint aux partis qui aspirent à les diriger; il dépend de l'action que l'Algérie peut exercer sur ses propres destinées, d'un effort fraternel de tous ses enfants vers un même but, qui est la création d'un self-government non politique assurément, mais économique et social. » Ces sages conseils furent entendus et les Délégations financières, comme on le verra, ne déçurent pas les espérances de leur fondateur.

De cruelles épreuves privées - la perte d'un fils - le souci de sa propre santé très ébranlée amenèrent M. Laferrière à résigner ses fonctions en octobre 1900 ; il fut nommé procureur général à la Cour de cassation et mourut l'année suivante. Il était venu en Algérie à une époque bien tardive de sa carrière et de son existence ; soucieux de ses responsabilités, il n'était pas sans montrer quelque inquiétude sur ce terrain nouveau pour lui.

 
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