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Une société s'engageait à construire à ses frais, sans
subvention ni garantie d'intérêt, un chemin de fer de 200
kilomètres de l'Ouenza à Bône, à faire également à ses frais
les installations nécessaires dans le port de Bône, enfin à payer
à la colonie une redevance pour l'extraction du minerai, qui devait
s'élever au minimum à un million de tonnes par an. "
C'était, dit M. Jonnart, la plus belle affaire que l'Algérie eût
jamais connue. " M. Révoil avait signé en 1903 un contrat
d'option que M. Jonnart s'empressa d'approuver. Cependant la
déclaration d'utilité publique rencontra des difficultés
insurmontables; les résistances provenaient surtout des producteurs
de minerais de fer de Suède et d'Espagne, minerais de composition
analogue à ceux de l'Ouenza, inquiets de cette concurrence, tandis
que les métallurgistes étaient désireux d'échapper par
l'exploitation de l'Ouenza à leurs fournisseurs habituels et de
s'approvisionner directement. L'affaire se compliqua de
considérations et interventions de toutes sortes : soucis
patriotiques parce que la société comprenait des métallurgistes
étrangers, rivalité de Bône et de Bizerte qui prétendait devenir
le débouché du minerai. Le dossier, approuvé par les assemblées
algériennes, fut transmis au gouvernement en 1904 et un projet de
loi déposé, concluant à l'approbation. Après les délais d'une
procédure interminable, qui dura plus de sept ans, la discussion
vint enfin devant la Chambre en janvier 1910 ; mais il fut
impossible d'obtenir le vote du projet.
L'affaire de l'Ouenza avait fait durement sentir à l'Algérie les
dangers de notre procédure administrative. Elle montrait la
nécessité de libérer les mines et les travaux publics de
l'Algérie, comme le sont ceux de sa voisine, la Tunisie, d'une
réglementation favorable surtout à ceux qui prétendent lui
interdire de mettre à profit ses richesses naturelles.
Les assemblées algériennes secondèrent efficacement tous les
progrès dans l'ordre moral et intellectuel aussi bien que dans
l'ordre matériel. Outre les sommes prélevées sur le budget
ordinaire, sur le fonds de réserve et sur les fonds d'emprunt pour
la colonisation, les travaux publics, l'aménagement des forêts, il
faut noter celles qui furent consacrées au développement de
l'assistance, aux progrès de l'hygiène, à la distribution de
l'enseignement public à tous les degrés. Les lois sociales de la
métropole et la législation ouvrière française furent étendues
à l'Algérie dans la mesure où elles étaient compatibles avec les
conditions d'existence spéciales à la colonie et avec les
modifications reconnues nécessaires en ce qui concernait les
indigènes et les étrangers. Une dotation de près de 3 millions de
francs fut inscrite à l'emprunt de 1908 pour l'amélioration et la
modernisation des hôpitaux civils. Un Institut Pasteur fut
organisé à Alger en 1910 ; des savants remarquables, comme le
docteur Sergent et le docteur Foley, y poursuivirent de remarquables
études sur l'hygiène et sur les maladies des hommes, des animaux
et des plantes.
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