L'ALGÉRIE de 1890 à 1914. La renaissance coloniale.
Alger devient une véritable
capitale et une des grandes cités méditerranéennes ; les
fortifications de 1840 sont éventrées pour lui permettre de
rejoindre ses anciens faubourgs de Mustapha et de Bab-el-Oued
; une véritable fièvre de construction fait surgir des
quartiers neufs. Un arrière-port est créé dans la baie de
l'Agha pour répondre à l'accroissement de la navigation. A
Oran, la ville se développe aussi, en dépit des obstacles
naturels et le commerce prend une ampleur tout à fait
remarquable; là aussi, de grands travaux de port sont
effectués pour la création de nouveaux bassins. A
Constantine, deux grands ponts sont construits au-dessus du
ravin du Rummel, la colline du Koudiat est dérasée, la ville
cesse d'être confinée sur son inaccessible rocher. Le port
de Bône est également agrandi.
L'Algérie est devenue une des meilleures clientes de la
France; en 1913, elle lui achète pour 550 millions de
marchandises et lui en vend pour 350 millions. Le duc de
Broglie disait que nous ne retirerions guère de notre colonie
africaine qu'une bonne armée : voici que, dans certaines
années, les exportations dépassent les importations et que
la France commence à s'inquiéter de la concurrence que
certains produits algériens font à ceux de son propre sol.
En 1910, le commerce de l'Algérie dépasse pour la première
fois un milliard; il a plus que doublé depuis 1904; en 1913,
dernière année normale avant la guerre, il atteint 1 168
millions. Voilà le prix de tant de peines, voilà le
bénéfice incontestable pour notre pays de la grandiose
entreprise poursuivie de l'autre côté de la Méditerranée,
au milieu de tant d'injustes et décourageantes critiques.
III
LA PÉNÉTRATION
SAHARIENNE
La convention franco-anglaise de
1890, en reconnaissant à la France sa zone d'influence dans
l'Afrique du Nord-Ouest, donnait au gouverneur général un
rôle nouveau. Si l'Algérie devait devenir la porte de
l'Afrique, c'est à lui qu'il appartenait de l'ouvrir et de la
tenir ouverte. Toute tentative pour relier l'Afrique du Nord
au Soudan nécessitait au préalable une politique saharienne
méthodique et vigoureuse. En cette matière comme pour la
politique indigène et pour l'organisation générale, M.
Jules Cambon a frayé la voie à ses successeurs.
Il reprit tout d'abord en main la direction des affaires
indigènes des territoires de commandement, qui avait été en
fait abandonnée aux généraux commandant les provinces
d'Alger, d'Oran et de Constantine, dont les efforts se
contrariaient parfois ; l'unité de notre action politique
dans le Sud fut rétablie.