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  L'ALGÉRIE DE 1914 À 1930  
     
  
La fusion des divers éléments européens s'est poursuivie dans des conditions satisfaisantes. La colonie étrangère, décimée par les mariages mixtes et les naturalisations automatiques, tend de plus en plus à se confondre avec la population d'origine française. La distinction entre les Français d'origine et les naturalisés présente de moins en moins d'intérêt. Les naturalisés ont eu pendant la guerre une attitude parfaitement loyale et leur conduite n'a donné lieu à aucune critique.
 
La fraternité des Algériens est désormais scellée dans le sang et il n'y a plus qu'une seule catégorie de Français : ceux qui ont combattu contre l'ennemi commun. C'est ici le lieu de se remémorer les pages où Renan a si éloquemment démontré que ce qui constitue une nation, ce n'est ni la forme du crâne, ni l'identité d'origine, mais la communauté des souvenirs et des espérances, des gloires et des deuils. D'autre part, l'immigration espagnole, en raison des conditions du change, n'est plus attirée par les hauts salaires et s'est arrêtée. Bref, on peut dire que la guerre, en Algérie, a fait avancer la fusion des éléments européens. Il n'est plus question du « péril étranger », qui avait paru si redoutable vingt ans auparavant.

Dans l'ensemble, l'Algérie a dû à la guerre un enrichissement au moins relatif, parce que la vie économique y a été moins complètement arrêtée qu'en France. Les Européens ont obtenu, notamment dans la viticulture, des bénéfices considérables. Mais les indigènes ont réalisé plus de profits encore que les colons et leur condition s'est transformée bien davantage. Il faut faire état des primes d'engagement et de démobilisation, des allocations journalières, des carnets de pécule, des salaires des travailleurs coloniaux; dans les communes de Kabylie, il a été payé pour 10 millions de francs de mandats postaux en 1914, 12 millions en 1915, 17 millions en 1916, 26 millions en 1917. Enfin et surtout, les hauts prix atteints par les céréales et par le bétail ont profité aux indigènes. Or, l'indigène possesseur de quelques ressources voit dans la terre le placement le plus sûr; inquiet de l'inflation fiduciaire, il cherche à se défaire de ses billets de banque et à les remplacer par des propriétés, qu'il est disposé à payer très cher.

Indigène saharien.
C'est ce qui explique la crise de la colonisation qui a accompagné la guerre.
 
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