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  L'ALGÉRIE DE 1914 À 1930  
     
  
Au début des hostilités, la mobilisation, les difficultés d'exploitation, l'incertitude des transactions et des transports avaient provoqué un fléchissement du prix des terres. Mais, dès la fin de 1917, les bonnes récoltes et la hausse des denrées agricoles amenèrent une plus-value générale. En 1919, la hausse est de plus en plus rapide et accentuée; une fièvre de spéculation sévit; bon nombre de propriétaires européens profitent de la hausse pour vendre leurs biens; quelques-uns les rachètent, puis les revendent plus cher encore. Les acquisitions de domaines européens par les indigènes sont de plus en plus nombreuses : « Vous nous avez pris la terre à coups de fusil, disent-ils, nous vous la reprenons à coup de douros. » En 1918 et 1919, les Européens vendirent aux indigènes 60 000 hectares de terre et en achetèrent seulement 35 000; le recul de la propriété européenne fut plus particulièrement marqué dans le département de Constantine et en Kabylie, où des centres entiers revinrent aux mains des indigènes; ce fait s'explique par la densité de la population indigène et la prédominance de l'élément berbère; dans l'Ouest de l'Algérie, les achats des Européens conservèrent presque partout la prépondérance.
 

LE TROISIÈME GOUVERNEMENT DE M. JONNART ET LES RÉFORMES INDIGÈNES (1918-1919)

En 1918, au moment de l'effort suprême, le gouverne ment de M. Clemenceau fit appel une fois encore à M. Jonnart et lui confia la direction des affaires de l'Algérie. Il s'agissait de faire accepter aux indigènes un recrutement militaire de plus en plus intensifié et aux colons des réformes indigènes très importantes : « Ne me demandez pas de soldats, avait dit M. Clemenceau à M. Jonnart, mais faites en sorte de m'en envoyer le plus possible. » Débarqué à Alger au milieu du mois de janvier 1918, le gouverneur général se mit immé­diatement en relations avec les chefs indigènes, qui lui promirent leur concours le plus dévoué; en deux mois, il obtint une levée de 70 000 hommes, dont 50 000 pour l'armée et 20 000 pour les usines de guerre.
Cet empressement créait aux indigènes un nouveau titre à notre affection et à notre reconnaissance. En 1915 et en 1916, diverses propositions émanées de l'initiative parlementaire demandaient que la France reconnût par un acte législatif le dévouement et la fidélité des indigènes algériens. En novembre 1915, les Commissions des affaires extérieures de la Chambre et du Sénat réclamèrent du gouvernement l'exécution des réformes promises par l'ordre du jour du 9 février 1914, réformes que la guerre avait fait ajourner. Les présidents de ces Commissions, MM. Clemenceau et Leygues, devenus ministres, se devaient à eux-mêmes de ne pas laisser plus longtemps ces promesses en suspens.
 
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