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  L'ALGÉRIE DE 1914 À 1930  
     
   Au point de vue fiscal, la réforme était plus significative et plus profonde. Jus­qu'en 1919, les impôts auxquels étaient assujettis les indigènes de l'Algérie et ceux que payaient les Européens étaient entièrement différents. Les impôts arabes étaient passablement compliqués et inégaux, mais ils reposaient sur de vieilles traditions; à maintes reprises, on avait songé à les modifier et à les réformer; dès 1859, le comte de Chasseloup-Laubat y avait pensé; M. Jules Cambon, après beaucoup d'autres, s'en était occupé en 1892; enfin M. Lutaud avait repris la question en 1911. La plupart des membres des assemblées algériennes déclaraient hautement que, une fois la paix conclue, l'égalité fiscale entre les Européens et les indigènes serait immédiatement réalisée. Dans leur session de 1917, ces assemblées avaient voté l'établissement de la contribution foncière sur la propriété non­bâtie, qui fut appliquée à partir de 1918. La guerre se prolongeant, le gouvernement demanda à l'Algérie de ne pas ajourner plus longtemps la réforme. Elle fut votée par les Délégations financières le 21 juin 1918, et un décret du 30 novembre homologua cette décision. Elle réalisait l'assimilation fiscale, l'égalité complète entre les contribuables européens et indigènes; le régime des contributions directes fut en même temps réorganisé d'après les principes qui venaient d'être mis en vigueur dans la métropole. En vertu de ces dispositions, les impôts arabes et la contribution des patentes cessèrent d'être perçus; ils furent remplacés par une série d'impôts cédulaires, auxquels sont soumis les revenus des différentes catégories et par l'impôt complémentaire sur le revenu. Les impôts arabes furent maintenus seulement dans les territoires du Sud, où les Européens sont peu nombreux et les indigènes beaucoup moins évolués.

Quant aux réformes d'ordre administratif et politique, elles entrèrent dans la pratique par la loi du 4 février 1919 et par les décrets du 6 février 1919. Le statut personnel des indigènes musulmans, tel qu'il était réglé par le sénatus-consulte de 1865, comportait deux degrés : celui de la naturalisation complète, pour l'indigène qui, renonçant au statut personnel musulman, se soumettait aux lois civiles et politiques de la France et acquérait la qualité de citoyen français; celui du sujet français, qui conservait le statut personnel musulman et demeurait soumis aux règles particulières édictées pour la population indigène, telles que celles qui concernaient les contraventions spéciales de l'indigénat et la compétence des tribunaux répressifs. Entre ces deux statuts, la loi du 4 février 1919 créa un statut intermédiaire, dont étaient appelées à bénéficier de nombreuses catégories d'indigènes, qui, par leur situation personnelle, par leur degré d'évolution ou par les services qu'ils avaient rendus, étaient en mesure de prendre part utilement à la vie publique et de concourir directement ou par des représentants choisis par eux à la gestion des intérêts de la communauté.

 
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