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II. - La vigne et le vin
Une autre richesse est pour l'Algérie la culture de la vigne. On
ne saurait nier la répercussion qu'a eue, dans le développement de
l'Algérie, la constitution du vignoble, consécutive à la crise
phylloxérique de 1880. Cette culture, rémunératrice surtout au
moment où le vignoble métropolitain voyait, par les attaques du
phylloxéra, diminuer sa superficie et sa production, ne pouvait que
s'étendre en Algérie, où elle trouvait un milieu éminemment
favorable. Aussi la superficie du vignoble algérien passait-elle de
23.000 hectares en 1880 à 123.000 en 1896.
C'était un attrait nouveau pour la colonie: hommes et capitaux,
séduits par cette industrie agricole rémunératrice, affluèrent
à cette époque en Algérie. « C'est elle, a-t-on dit, qui a
déclenché en quelque sorte la prospérité magnifique dont la
colonie, après avoir longtemps végété, jouit depuis une
trentaine d'années. »
Mais bientôt le phylloxéra faisait là aussi des ravages en 1917,
94 % du vignoble était contaminé. La reconstitution, toutefois,
s'opérait rapidement au moyen de portegreffes américains et
l'essor de la vigne, un instant arrêté, reprenait de plus belle.
On compte actuellement 250.000 hectares de vignes, dont 226.000
seulement sont en production; la différence représente les
vignes phylloxérées non encore reconstituées et les jeunes plantations
qui ne sont pas entrées en production. Il semble que la superficie
du vignoble algérien ne doive guère dépasser maintenant 250.000
hectares ; le chiffre de 300.000 parait être un extrême maximum,
car les terres à vignes sont plutôt limitées.
L'aire de la vigne s'éloigne assez peu , du littoral; tout au plus
son extrême limite méridionale dépasse-t-elle une centaine de
kilomètres. Elle correspond à peine à l'aire de dispersion de
l'olivier.
La culture s'étend, dans le département d'Alger, sur 85.000
hectares, dans la Mitidja, le Sahel, et dans les régions de
Miliana, de Médéa et d'Aïn-Bessem. La production atteint en
année moyenne 5 millions d'hectolitres de vin.
En Oranie, on compte un peu moins de 125.000 hectares de vignes,
répartis dans le Sahel et la plaine d'Oran et dans les régions de
Mostaganem, de Tlemcen, de Sidi-Bel-Abbés et de Mascara. Ils
fournissent 5 à 6 millions d'hectolitres.
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Dans le département de Constantine, la superficie dépasse à peine 17.000
hectares, s'écartant assez peu de la côte régions de Bougie et de Djidjelli,
plaines de Bône et de Philippeville. La production moyenne s'établit autour
d'un million d'hectolitres.
Les vins algériens, au point de vue de leurs qualités, peuvent être
classés en trois catégories :
les vins de plaine, titrant 9 à 12° d'alcool, qui peuvent être
utilisés comme vins de table, mais que le commerce métropolitain emploie en
grande quantité pour le coupage des vins des vignes à grand rendement du
midi de la France;
les vins de coteaux, dont le degré alcoolique est de 11 à 13°, et
qui sont d'excellents vins de table d'une bonne conservation;
les vins de montagne, contenant de 12 à 15° d'alcool; ce sont des
produits parfaitement constitués, de bonne conservation, qui peuvent
acquérir, après plusieurs années de bouteille, des qualités remarquables
de finesse et de bouquet.
Certains de ces vins, bien que n'étant pas classés parmi les grands vins,
ont su, grâce à leur finesse, à leur bouquet, acquérir une place
appréciable sur la table des connaisseurs tels sont, pour n'en citer que
quelques-uns, les Médéa, les Mansourah, les Mascara, etc...
Mais ce n'est pas à ce titre que les produits d'Algérie ont une importance
considérable dans le marché des vins. Ils la tirent surtout de leur richesse
alcoolique, de leur robustesse et de leur couleur qui en font des vins de
coupage recherchés pour améliorer certains vins métropolitains. Le marché
de Bercy en fait une consommation considérable, trois à quatre millions
d'hectolitres peut-être, si l'on s'en rapporte aux seules importations par le
port de Rouen.
C'est d'ailleurs vers la France qu'est dirigée la plus grande partie des
exportations algériennes; le marché français absorbe 7 à 8 millions
d'hectolitres de vins d'Algérie; le surplus est expédié vers l'étranger
(Suisse, Allemagne, etc ...) et vers les colonies. Quant à la consommation
locale, elle ne dépasse guère 1 million et demi à 2 millions d'hectolitres,
car elle est limitée à la population européenne, les indigènes musulmans
ne pouvant, conformément aux prescriptions du Coran, boire de boissons
alcooliques.
Mais le vin n'est pas le seul produit commercial de la vigne. Il faut citer
les mistelles, qui font l'objet, surtout dans le département d'Oran,
d'une importante fabrication.
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