L'alfa exige une faible pluviométrie (moins de 50 cm. de pluies par an) et
des terrains perméables et secs : à cet égard, tout le département d'Oran,
du Nord au Sud, lui convient; il y occupe près de treize cent mille hectares,
plus du double si l'on ajoute les peuplements des annexes de Méchéria et de
Géryville, appartenant administrativement aux Territoires du Sud mais
géographiquement aux Hauts-Plateaux Oranais. La pluviométrie est déjà plus
élevée dans le département d'Alger: les peuplements d'alfa ne s'étendent
que sur 6 à 700.000 hectares. Sur les Hauts-Plateaux Constantinois, mieux
arrosés encore, plus étroits aussi, on ne trouve plus que 600.000 hectares.
La densité alfatière va donc en diminuant de l'Ouest à l'Est.
L'emploi de l'alfa dans la fabrication du papier remonte au milieu du siècle
dernier; il est dû aux recherches d'un papetier écossais. Un centre de
manipulation et d'embarquement de l'alfa fut créé à Arzew par cet
industriel : en 1870, 42.000 tonnes étaient déjà expédiées en Écosse ;
dix ans plus tard, les exportations atteignaient 80.000 tonnes. Elles
s'établissaient, dans les années qui précédèrent la guerre, autour de
110.000 tonnes. Elles dépassent actuellement 200.000 tonnes. Progression
rapide, on le voit, qui est la preuve de l'activité croissante des chantiers
d'exploitation.
L'alfa est une graminée vivace. La feuille contient une fibre très fine et
très résistante. Elle se détache facilement de la souche et il suffit d'une
traction très légère pour l'en séparer. Nous avons vu que les climats secs
lui conviennent; il lui faut aussi des étés chauds, mais il s'accommode
très bien, en hiver, de basses températures: c'est ainsi qu'à El-Aricha,
sur les Hauts-Plateaux Oranais, il supporte 12 à 16° de froid. Sa
rusticité, ses exigences très faibles, on le voit, en font une plante de la
steppe; il en est presque l'unique ressource, il en est en même temps la
richesse.
Il faut, en effet, pour sa cueillette, une nombreuse main-d'œuvre, quelque
peu expérimentée. On la trouvait autrefois parmi les immigrés espagnols de
l'Oranie - car l'Espagne, elle aussi, possède des peuplements d'alfa
exploités avant ceux d'Algérie; -maintenant, les tribus indigènes nomades
qui viennent, à l'époque de la récolte, camper à proximité des chantiers
la fournissent en abondance : hommes, femmes, enfants, des plus jeunes aux
plus vieux, tous sont occupés à l'arrachage de l'alfa. Ils apportent leur
cueillette au chantier de pesage; l'alfa, pesé, est payé aussitôt.
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