marche tortueuse de ces
montagnards. "
Ben-Salem s'en retourna chez lui avec les chefs des Flissas
; et l'émir, protégé par l'anaya du cheik Amzian, arriva à
Bordj-el-Bouïra, en passant derrière les monts Jurjura. Il
parcourut en longueur et en largeur la plaine de Hamza, et
disparut bientôt s'enfonçant dans le Gharb.
Tel fut l'accueil qu'Abd-el-Kader, aux plus beaux jours de
sa puissance, reçut dans les montagnes de la haute Kabylie.
Certes, il était encore bien éloigné d'y asseoir son
autorité absolue, celui qui, sur un frivole soupçon, courait
ainsi danger de mort et se voyait réduit à la fuite la plus
précipitée. A part cet incident d'ailleurs, il n'avait pu
prononcer en aucun lieu le mot d'impôt sans soulever de suite
un orage ; et ceci renfermait la condamnation sans appel de
toutes ses espérances antérieures.
Mais si, renonçant à des vues trop ambitieuses, Abd-el-Kader
ne cherchait plus dans les Kabyles que des alliés solides,
peu exigeants et toujours en sous-ordre, ce résultat
précieux semblait lui être acquis : son dernier voyage n'y
avait pas médiocrement contribué. Pendant ce court trajet,
il avait su se faire apprécier des fiers et énergiques
montagnards. La simplicité et la pureté de ses mœurs, son
affabilité, sa piété, sa science, les titres vénérés de
hadj (1) et marabout, sa brillante réputation de guerrier,
son éloquence de prédicateur, tout en lui saisissait. Aucun
de ceux qui purent le voir et l'entendre n'échappèrent à
cette influence. Des poètes en firent le sujet de leurs
chants (2).
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